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Récit de ma migration
25 mars 2015

Les mots dangereux

 

 

Oui, il y a des mots dangereux, des mots du genre à vous faire tourner sept fois votre langue avant de les prononcer, on en a tous quelques uns en réserve… Pour moi, depuis quelques temps, il y en a eu deux dans cette catégorie, pourtant, ils sont bien anodins. Chaque fois  que je devais utiliser l’un ou l’autre, il y avait comme un passage à vide dans le débit de ma phrase, une espèce d’apnée. Vous allez rire : il s’agit de fin de semaine et de cellulaire. Ou plutôt quatre mots, car il y a ceux que l’on utilise en France pour dire la même chose. Bien que tout le monde parle français, certains mots ne sont pas les même au Québec et en France où là-bas, on dit  : week-end et portable. Le temps de savoir si il fallait dire fin de semaine ou week-end ? cellulaire ou portable ? il fallait donc passer par mon GPS interne pour localiser où j’étais et trouver la solution. Dieu merci, la vitesse de mon activité cérébrale n’a pas encore trop baissé, je trouvais vite la solution et mon hésitation ne se remarquait pas trop, il me semblait que personne ne l’avait vraiment remarqué.

Quand on parle, c’est pour être compris, il faut donc utiliser le vocabulaire de son interlocuteur. Si je dis week-end au Québec, je sais qu’on va me prendre pour un de ces maudits français qui utilisent l’anglais sans vergogne, et surtout, sans respect des luttes que les québécois, eux, mènent depuis des siècles pour maintenir notre langue. Et en France, j’avais trop souvent vu de ces français qui en revenant d’Amérique, pour faire « moderne » se paraient des habitudes qui y avaient cours et nous prenaient pour des « paysans » mal dégrossis. Pas question de faire quoi que ce soit qui puisse être interprété dans ce sens.

Je m’explique mal pourquoi ces deux mots, et pas d’autres. Par exemple, je ne pourrai jamais dire « chez nous » au Québec quand je veux dire « chez moi ». Avoir un « chez moi » a été l’aboutissement de luttes suffisamment mémorables dans mon existence pour avoir l’impression de les effacer par la formule « chez nous ».  Tout comme en France, je ne me gêne pas pour avoir recours aux jurons québécois beaucoup plus riches que les jurons qu’on y utilise. Il y a-t-il donc des limites à mon désir de disparaitre dans la foule ? 

Mais d’abord, est-ce bien un désir de disparaitre dans la foule ? Respecter le langage, c’est s’assurer une meilleure compréhension. À la réflexion, c’est pas seulement ça. Utiliser le langage de l’autre, c’est aussi une façon de le reconnaitre, de se reconnaitre en lui, un acte d’amour en quelque sorte. Mais il y a des limites, je ne peux dire « chez nous ». 

L’autre jour, J. m’a pas mal surprise : Ha ! tu dis maintenant fin de semaine comme nous. Depuis tout ce temps, il n’avait pas remarqué mes efforts désespérés pour éviter de dire week-end !!

 

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Commentaires
T
Mais comment avez-vous découvert...? Ça fait un an que j'étais coite
M
Te reste plus qu'à acquérir un cell et tu seras full convertie.
L
Et moi, toute québecoise que je sois, je dis weekend. Mais pas portable.
Récit de ma migration
  • J'ai décidé de quitter Paris pour vivre dans les Laurentides. Quelle histoire ! Ce blog est destiné à être pour moi comme le fil rouge d'une rive à l'autre de l'Atlantique. Il s'adresse à ceux qui, comme moi, ont envie d'en savoir plus sur cette aventure.
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